Aimer déjà

Nous en usons. Nous le vampirisons. Nous le parlons, on épilogue à son propos. Parfois, certains le chantent. Il y a mille et une façons de l’exprimer. On peut le crier, aussi parfois. Ou le murmurer, tout bas, au creux, à cet Être si particulier. Pourtant, la plupart du temps, on le dit, sans y penser, sans l’éprouver, sans l’avoir éprouver, sans le connaître, sans le cœur. Car il n’est là question que de cœur. Mettez-y de la raison et vous le violez, en toute impunité. Vous lui arrachez toute sa valeur. Il n’en a plus, vidé. Comme échoué au rivage d’une côte, fendu contre le granit, au bas d’une falaise, contre la pierre, froide et sans âme. Car il n’a d’autre raison, à supposer que cela en relève, que celle du cœur. Dire le moins pour en dire le plus. C’est une litote par essence. Il contient en lui tout le sens, toutes les questions, sans réponses, c’est un mystère. "Je T’Aime." Oui. Mon Être, sujet "Je", toi, mon Autre, cet inconnu, cette part entière qui n’est pas moi. Ton Être, malgré cette frontière, me touche, me transcende, m’élève. Mes lèvres, l’espace d’un souffle, expire. J’inspire. Je respire. Tout se sublime. Le temps, l’espace, l’espace d’un temps s’efface. Et inspirée, ce souffle expiré murmure un langage qui n’est pas de ce monde. Ce divin. Cet Un : Je t’aime. "Aime" de toi à moi, de deux individus, nous sommes. C’est un art.

Nous disons : "Faire l’Amour". Mais, savons-nous ce que c’est ?! Faire l’Amour ? Je t’aime, et à cet instant, dans chacun de ces instants, dans l’espace, dans le temps, où qu’il soit, nous faisons l’Amour. Dans l’absence, dans la présence. Ces regards indécents de deux êtres qui s’aiment, ne peut retenir aucune pudeur. Ils s’enveloppent l’Un l’Autre. A distance, ils émanent l’Un de l’Autre. C’est une évidence. C’est plus fort que nous. Nous pouvons le regarder, cet Être, loin de son aimé, il aime. Nous les regardons et sourire. Ces deux là, ils s’aiment. Nous nous sentirions presque de trop, comme mal venus, dans une intimité dévoilée, ces deux êtres le cœur à nu, dans leur enveloppe, s’aiment. Cet état d’être, ils le font : l’Amour. C’est un art d’aimer.

Nous sommes les artistes de l’Amour, pourvu que nous nous laissions inspirer, libre de le vivre. Cela exige un abandon entier de son "Moi" pour être touché par cet Autre. S’immerger dans cet inconnu, sans peur, ni raison, ni réserve. En soi, c’est une évidence. Mais, les êtres rationnels que nous sommes, s’excusent. L’éprouver est un état. Le vivre est un acte. Alors, parfois, ces deux êtres se perdent pour mille et une raisons. Cette histoire d’amour impossible vous l’avez déjà entendue. Nous connaissons le film. Des considérations d’Homme social, qui a des comptes à rendre. Les arguments prolifèrent, comme ces parasites. Alors, on trouve des moyens de les contrer, sans jamais vraiment sans accommoder. Alors, on se fait une raison, à défaut de faire l’Amour. Une raison pour étouffer, parce qu’il faut continuer à exister. Là, un voile se dépose, sur notre cœur qui crie famine. Il crie l’absence, le manque. Le sang coule dans les veines, tâché. A défaut, de vivre, on s’en tient à ses arguments, à cette raison que l’on gave d’autres raisons. Nous les créons pour cela, oublier l’absence de sens. Comme notre pétrole, dont nous ne pouvons plus nous passer, comme ces raisons. En effet, en perte d’essence, sans lui, nous serions anéantis, le néant de nos vies, vide de sens.

 

L’Amour n’est pas une valeur sure, car sa valeur n’a pas de prix.

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